Richard mercredi 13 Août 1976 un demi

Richard mercredi 13 Août 1976 un demi

- Richard, puis-je aller voir comment ils rangent leurs parachutes ?

- As-tu fait le plein ?

- Oui, plein fait, cagette¹ rentrée et mise en cale. Clefs et dossiers rendus à l’accueil.

- Parfait, tu peux y aller mais à dix-sept heures nous rentrons.

Je ne sais pas s’il m’a entendu, je le regarde courir vers le grand hangar jaune.

Tout à l’heure, dans la voiture, il m’expliquera comment les plier jusqu’au moment où, il s’arrêtera et me dira : «Tu sais déjà tout ça, n’est-ce pas ?»

Il fera la gueule cinq minutes appuyé à la fenêtre, regardant dehors, rêveur. J’aimerais pouvoir rentrer dans sa tête. Jusqu’à ce que je pose ma main sur sa cuisse, que la tapote en riant. Oui, je sais déjà tout ça, mais j’aime l’entendre me parler en s’emballant, essayant de me communiquer son bonheur d’avoir appris quelque chose de nouveau. C’est là, où il me donne l’impression d’avoir une toute petite place dans sa vie.

Assis sur un des hauts tabourets du bar de l’aéroclub, j’observe mon reflet dans le miroir.

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- Bernard, une bière !

- Vous n’êtes pas majeurs.

- Aller, sois sympa.

- Qu’est-ce que vous fichez là ?

Les deux frères grimacent sous la poigne de l’homme qui vient de les saisir par le cou.

- On avez soif, on se commandait un coca.

- Ce n’est pas ce que j’ai entendu. Bernard sert leur ce qu’ils t’ont commandé.

- Raoul t’es sûr ?

- Oh oui. (L’homme pose devant les deux garçons et devant le père, une grande chope de bière brune bien mousseuse.) Et puisque vous êtes des hommes, on lève le coude et d’une traite.

Sa chope vide claque sur le comptoir, à côté de lui, les deux garçons peinaient mais continuent, trop fiers pour admettre qu’ils n’aiment pas.

- Hum, c’était bon.

L’enfant sourit, une moustache brune ornant sa lèvre supérieure glabre d’ado.

Le père pousse les deux chopes vers l’autre homme :

- Remets nous ça ! Alors et toi ? Tu en veux une autre ?

A sa gauche, l’autre garçon garde sa chope levée, on le voit déglutir de plus en plus lentement puis il repose le bock trop gros pour sa main en secouant la tête.

- Non merci Papa.

Bernard pose devant le père et le premier garçon, une nouvelle chope dont la mousse déborde sur la anse.

- Aller mon fils, cul sec !

- L’enfant lève le menton fier et se saisissant du contenant, le porte à ses lèvres et commence à le vider.

Le bock du père claque à nouveau peu de temps après, celle du garçon la rejoint, saluée par un rôt sonore qui fait rire les deux hommes.

- Une autre !

- Raoul ?

- Non ça lui suffira, maintenant, je m’en vais mettre ces deux «hommes» entre les mains de leur mère.

Bernard fait une grimace signifiant autant la peur que le compassion pour les deux galopins, puis éclate de rire.

- Je préfère que ce soit eux que moi.

Le père pousse ses deux garçons devant lui mais laisse le premier garçon tenir la porte pendant qu’il jette sur son épaule, le jumeau qui tangue en marchant.

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Richard sourit à l’homme à la barbe et aux cheveux bien blanc qui essuie un verre devant lui.

- Bernard tu te souviens de ma première bière ?

- Oh oui, vous aviez quelque âge ?

- Douze ans, peut-être moins. Je ne sais pas ce qu’il espérait ?

- Toi et ton frère vous étiez quand même de sacrés morceaux. Ton gamin, il ressemble plus à toi ou à Rémy ?

- Je préférerai qu’il ressemble plus à Rémy, mais bon, il ne ressemblera ni à moi ni à lui et franchement je m’en fous.

Richard dans le miroir regarde arriver l’ado, dont le short flotte toujours autour de ses jambes maigres qui ne s’arrête de courir que pour sauter sur le tabouret à côté du sien. Alors c’était bien ? Bernard sert lui un demi.

- Non merci plutôt un coca.

- Ton père aurait été déçu avec lui.

Le garçon regarde sans comprendre les deux hommes qui se sont mis à rire

1Avion d’aéroclub DR400